POURSUITE CONTRE LE PROMOTEUR À LA SUITE DE L'INSPECTION DE L'IMMEUBLE
COUR DU QUÉBEC
«Division des petites créances»
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC DISTRICT DE MONTRÉAL
«Chambre civile»
N°: 500-32-095417-061
DATE: Le 4 juin 2007
SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE FRANÇOIS BOUSQUET, J.C.Q.
SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ 8845 RUE LAJEUNESSE;
Demandeur défendeur reconventionnel
c.
2323-4255 QUÉBEC INC.;
Défenderesse demanderesse reconventionnelle
JUGEMENT
[1] Le demandeur défendeur reconventionnel (demandeur) administre les parties communes d’un immeuble construit et vendu par la défenderesse demanderesse reconventionnelle (défenderesse) et il lui réclame une indemnité pour le motif qu’elle n’aurait pas exécuté complètement et correctement ses obligations.
[2] La défenderesse conteste la demande et elle réclame 2 000$ par voie de demande reconventionnelle pour compenser les «troubles encourus - pertes de temps - dépenses [1] ».
DEMANDE PRINCIPALE
[3] La demande principale comprend les neuf réclamations suivantes:
Honoraires d’avocat: 483,11$
Frais d’expert: 805,18$
Réparation du système d’intercom: 112,15$
Frais du condo #100: 541,31$
Travaux d’électricité: 917,06$
Travaux de ventilation: 1 311,28$
Fourniture et installation d’extincteurs dans les escaliers (200$) ainsi que de rampes devant le panneau électrique (650$): 850,00$
Rampe et main courante pour l’escalier arrière: 1 100,00$
Crépi: 1 965,64$
Total: 8 085,73$
[4] Afin de respecter la limite monétaire de juridiction de la Division des petites créances de la Cour du Québec, le demandeur réduit sa réclamation à la somme de 7 000$.
[5] Le Tribunal traitera distinctement de chacune des réclamations.
Honoraires d’avocat
[6] L’article 1081 alinéa 1 C.c.Q. se lit comme suit:
«Le syndicat peut intenter toute action fondée sur un vice caché, un vice de conception ou de construction de l'immeuble ou un vice du sol. Dans le cas où les vices concernent les parties privatives, le syndicat ne peut agir sans avoir obtenu l'autorisation des copropriétaires de ces parties.» (Soulignement ajouté)
[7] Le demandeur a payé les honoraires de l’avocat que les copropriétaires ont consulté relativement à des avis d’hypothèques légales de la construction affectant chacun des condominiums situés dans l’immeuble et il en demande le remboursement.
[8] Ces honoraires ne concerne pas un «vice caché, un vice de conception ou de construction de l’immeuble ou un vice de sol» et, conséquemment, ce sont les copropriétaires eux-mêmes qui doivent exercer un recours s’ils estiment avoir droit à une compensation pour le préjudice résultant des hypothèques légales.
[9] La première réclamation n’est donc pas fondée.
Frais d’expert
[10] Le demandeur réclame 805,18$ représentant les frais payés à son expert [P-3] dans le cadre d’une réclamation à «La garantie des maisons neuves de l’A.P.C.H.Q.»
[11] Cette demande relative à des vices de construction était bien fondée puisqu’elle a été partiellement accueille par décisions datées du 25 avril [P-10] et 11 octobre 2005 [P-11] .
[12] Puisque les frais d’expert sont raisonnables et qu’ils ont été encourus par la faute de la défenderesse, le Tribunal conclut que le demandeur a le droit d’en obtenir le remboursement.
[13] La deuxième réclamation au montant de 805,18$ est donc fondée.
Système d’intercom
[14] Le témoignage de la représentante du demandeur peut être résumé comme suit concernant la réclamation relative au système d’intercom:
La défenderesse n’a jamais remis au demandeur le manuel d’instruction du système d’intercom.
En septembre 2005, le système cesse de fonctionner et elle appelle le représentant de la défenderesse qui lui donne le numéro de téléphone de son sous-traitant afin qu’il lui soit demandé de venir corriger la situation.
Le technicien effectue la réparation et, subséquemment, le demandeur est surpris de recevoir une facture de 112,15$ [P-5] parce qu’il croyait que la réparation serait couverte par la garantie du sous-traitant.
Le demandeur paie néanmoins cette facture sans communiquer préalablement avec la défenderesse.
[15] Le représentant de la défenderesse témoigne à l’effet que son sous-traitant devait exécuter la réparation sans frais et qu’il aurait pu faire annuler la facture sans difficulté s’il en avait eu connaissance.
[16] Le Tribunal conclut que la décision du demandeur de payer la facture de sous-traitant à l’insu de la défenderesse a causé un préjudice à cette dernière.
[17] Pour ce motif, la troisième réclamation au montant 112,15$ sera rejetée.
Frais du condo #100
[18] Le demandeur réclame 541,31$ à titre de contribution aux charges communes pour l’unité 100 pendant la période du 18 novembre 2004 au 11 mai 2005.
[19] Il est admis que le demandeur débute ses activités le 18 novembre 2004 et, qu’à cette date, la défenderesse est toujours propriétaire de l’unité 100 qui est finalement vendue le 11 mai 2005.
[20] La défenderesse ne conteste pas l’exactitude du montant réclamé mais elle refuse de payer la contribution aux charges communes pour le motif que plusieurs des copropriétaires ont occupé l’immeuble avant le 18 novembre 2004 et qu’elle ne leur a rien demandé à titre de contribution aux charges communes pour la durée de cette occupation préliminaire.
[21] Il est inutile de déterminer si la défenderesse a droit à une indemnité à titre de contribution aux charges communes pour l’occupation antérieure au 18 novembre 2004.
[22] En effet, si la défenderesse estime avoir droit à une compensation quelconque, il faudrait qu’elle adresse sa demande à chacun des copropriétaires concernés et non pas au demandeur.
[23] La quatrième réclamation au montant de 541,31$ sera donc accueillie.
Travaux d’électricité
[24] Le demandeur réclame le remboursement d’une facture de 917,06$ pour divers travaux d’électricité décrits comme suit dans la facture litigieuse:
«26 janvier 2006 Syndicat de copropriété 8845 Lajeunesse [102] Mtl H2M 1R8 388-4799
Divers travaux électrique: À la demande de G. Chrétien
2 kits de sortie d’urgence mural avec batteries et têtes d’éclairage connecter sur le 120 volts de marque LUXNET [98,00$] = 196,00$
8 conversion indicateur LED de sortie lampe permanente EXIT = 160,00$
4 spots 12 volts au bout escalier = 76,00$ -1 détecteur de monoxyde de carbone qui ferait partir fan au garage [évacuer] + sonore = 92,00$
Tous le travail d’installé [45,00$] heure x 8 avec déplacement = 360,00$
TOTAL: 801,00$
T.P.S.: 56,07$
T.V.Q.: 59,99$
TOTAL: 917,06$»
[P-14, Sic]
[25] Comme on le voit, cette facture comprend deux catégories de travaux, soit l’éclairage d’urgence et le détecteur de monoxyde de carbone.
[26] La réclamation concernant le détecteur de monoxyde de carbone est irrecevable puisque le rapport de l’expert du demandeur mentionne ce qui suit:
«Garage:
…on retrouve deux ventilateurs mécaniques qui sont activés par des interrupteurs. L’installation est conforme puisque le Code national du bâtiment du Canada n’exige pas qu’un système de monoxyde de carbone soit installé dans un bâtiment comprenant moins de 5 automobiles tel que stipulé à l’article 9.32.1.1, troisième paragraphe…»[2]
[27] La facture de l’électricien précise que le détecteur de monoxyde de carbone coûte 92$ mais elle ne précise pas le temps requis pour son installation. Pour cette installation, le Tribunal accorde arbitrairement une somme de 45$ représentant une heure de travail.
[28] Après avoir ajouté les taxes, la portion de la facture de l’électricien applicable au détecteur de monoxyde de carbone s’élève 157,58$ [3] .
[29] Les témoignages sont par ailleurs contradictoires quant à l’éclairage d’urgence:
Les représentantes du demandeur témoignent à l’effet que l’éclairage d’urgence n’était pas complété lorsque la défenderesse a quitté le chantier.
Le représentant de la défenderesse contredit ces deux témoignages.
[30] Le Tribunal retient la version du demandeur en raison de ce qui suit:
Le rapport d’expert daté du 23 février 2005 précise que «le système d’incendie pour le feu ne semble pas fonctionnel. Les déclencheurs manuels ne sont pas opérants. Il n’y a pas de lumière d’urgence et de lumière indiquant les sorties». [P-17, page 7]
Les photos jointes à ce rapport permettent de constater la présence de fils qui pendent à divers endroits dans les corridors.
[31] La défenderesse plaide par ailleurs qu’elle a subséquemment exécuté tous les travaux exigés par «La garantie des maisons neuves de l’A.P.C.H.Q.» dans sa décision du 25 avril 2005.
[32] Cet argument additionnel n’est d’aucun secours à la défenderesse puisque la décision du 25 avril 2005 se limite à constater que «La garantie des maisons neuves de l’A.P.C.H.Q.»ne couvre pas la réclamation relative à l’éclairage d’urgence pour le motif qu’il s’agit d’un problème de travaux non complétés et non pas d’un problème relié à un vice de construction.
[33] D’ailleurs, si les travaux avaient tous été complétés tel que l’allègue la défenderesse, le Tribunal ne voit pas pourquoi le demandeur aurait payé un électricien pour terminer l’installation de l’éclairage d’urgence.
[34] Tel que mentionné précédemment, la portion de la facture de l’électricien applicable au détecteur de monoxyde de carbone s’élève 157,58$. Cette somme doit être retranchée du montant de 917,06$ réclamé pour les travaux d’électricité puisque le Tribunal a déjà décidé que la défenderesse n’avait pas d’obligation à l’égard de cet accessoire.
[35] La cinquième demande sera donc accueillie partiellement, soit pour la somme de 759,48$.
Travaux de ventilation
[36] Le rapport de l’expert du demandeur mentionne ce qui suit concernant le système de ventilation:
«Dans la plupart des unités, il y a un surplus d’humidité engendrant de la condensation, du givre, de la glace et de la moisissure sur le cadrage inférieur des portes et fenêtres.
Suite à une vérification des sorties d’évacuation situées sur le toit, nous avons pu constater que les tuyaux comprennent des clapets et que ceux-ci, par temps froid, gèlent ne permettant pas à l’air chaud et humide de s’évacuer du bâtiment.
Nous recommandons de remplacer les cols de cygnes par des boîtes d’évacuation avec clapets multiples tel que la compagnie Ventilation Maximum le propose…». [4]
[37] Après l’expertise, «La garantie des maisons neuves de l’A.P.C.H.Q.» a rendu une décision datée du 25 avril [P-10] dans laquelle elle a demandé à la défenderesse de corriger la situation et il n’est pas contesté que cette dernière a effectivement exécuté certains travaux pour donner suite à la décision.
[38] Les travaux ne sont toutefois pas identiques à la recommandation contenue dans le rapport de l’expert et la preuve est contradictoire quant à leur efficacité:
Le représentant de la défenderesse dit que les travaux étaient suffisants pour régler le problème.
Les copropriétaires n’avaient pas confiance dans cette réparation et le demandeur a fait exécuter les corrections recommandées par son expert dans le rapport du 23 février 2005. Ces travaux ont été exécutés en novembre 2005 par Installations C.A.S. enr. au prix de 1 311,28$ [P-12].
[39] Il n’y a aucun élément de preuve permettant de conclure que les travaux exécutés par la défenderesse étaient inadéquats.
[40] Au contraire, la décision supplémentaire du 11 octobre 2005 mentionnée précédemment [P11] précise ce qui suit:
«La garantie des maisons neuves de l’A.P.C.H.Q. n’a plus à intervenir concernant les points 1, 2, 3, 6, 8, 10 et 11 qui suivent, les travaux ayant été effectués par l’entrepreneur:
1. Ventilation inadéquate des unités Inspection:
Nous avons constaté que l’entrepreneur avait isolé les cols de cygne sur la toiture».
(Soulignement ajouté)
[41] La sixième réclamation au montant de 1 311,28$ sera donc rejetée.
Extincteurs dans les escaliers et rampes devant le panneau électrique
[42] Le demandeur réclame le remboursement de la somme de 850$ payée en octobre 2006 afin d’acheter et de faire installer des extincteurs dans les cages d’escalier ainsi que des rampes de protection devant le panneau électrique situé dans le garage.
[43] C’est le demandeur qui a le
fardeau de prouver que la défenderesse avait l’obligation de fournir ces
accessoires et le Tribunal conclut qu’il n’en a pas fait la preuve
prépondérante en raison de ce qui suit:
Les représentantes du demandeur témoignent à l’effet que les travaux ont
été faits à la demande de l’assureur et ces témoignages sont conformes à
la lettre d’AXA Compagnie d’assurance produite comme pièce
P-10.
Il serait toutefois déraisonnable de conclure qu’un entrepreneur doit exécuter des travaux pour le seul motif qu’un assureur les requiert.
Par ailleurs, le rapport d’expert du demandeur ne comporte aucune mention quant à des extincteurs et, bien qu’il suggère l’installation d’une rampe devant le panneau électrique, il n’indique nullement que cet accessoire serait exigé par les règles de l’art ou encore par le Code national du bâtiment du Canada.
[44] La septième réclamation au montant de 850$ sera donc rejetée.
Rampe et main courante dans l’escalier arrière
[45] Le demandeur réclame la somme de 1 100$ pour l’achat et l’installation d’une rampe et d’une main courante dans l’escalier arrière.
[46] La défenderesse reconnaît que ces accessoires sont requis par le Code national du bâtiment du Canada lorsque la hauteur totale excède 24 pouces mais elle conteste la réclamation pour le seul motif que l’escalier en question aurait une hauteur totale inférieure à 24 pouces.
[47] C’est le demandeur qui a le fardeau de prouver que l’escalier a une hauteur supérieure à 24 pouces et le Tribunal conclut qu’il en a fait la preuve prépondérante en raison de ce qui suit:
Le rapport d’expertise conclut à la nécessité de ces accessoires parce que la hauteur totale excède la limite fixée par le Code national du bâtiment du Canada.
Les photos jointes au rapport de l’expert permettent de constater facilement que la hauteur totale de l’escalier excède 24 pouces.
[48] La huitième réclamation au montant de 1 100$ sera donc accueillie.
Crépi
[49] La défenderesse reconnaît sa responsabilité quant au crépi mais elle conteste la demande pour le motif que les travaux auraient pu être exécutés pour un coût inférieur au montant payé, soit 1 965,64$.
[50] Il n’y a aucun élément de preuve à l’appui de cet argument et la neuvième réclamation sera donc accueillie en entier.
[51] La défenderesse sera donc condamnée à payer la somme totale de 5 171,61$ se détaillant comme suit:
Frais d’expertise: 805,18$
Frais du condo #100: 541,31$
Travaux d’électricité: 759,48$
Rampe et main courante dans l’escalier arrière: 1 100,00$
Crépi: 1 965,64$
Total: 5 171,61$
[52] Le point de départ du calcul des intérêts au taux légal et de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. variera comme suit:
La somme de 1 346,49$ (frais d’expertise et frais du condo #100) portera intérêts et indemnité additionnelle à compter de la date de la lettre de mise en demeure P-1, soit le 29 novembre 2005.
La somme de 759,48$ (travaux d’électricité) portera intérêts et indemnité additionnelle à compter de la date de la facture de l’entrepreneur électricien, soit le 26 janvier 2006.
La somme de 1 100$ (rampe et main courante de l’escalier arrière) portera intérêts et indemnité additionnelle à compter de la date de la facture du fournisseur, soit le 15 octobre 2006.
La somme de 1 965,64$ (crépi) portera intérêts et indemnité additionnelle à compter de la date de la facture de l’entrepreneur, soit le 4 mai 2007.
DEMANDE RECONVENTIONNELLE
[53] Tel que mentionné précédemment, la défenderesse se porte demanderesse reconventionnelle et réclame la somme de 2 000$ pour «troubles encourus – pertes de temps – dépenses».
[54] Il n’y a aucun élément de preuve à l’appui de la demande reconventionnelle et lors de l’audition, le représentant de la défenderesse n’a présenté aucun argument à l’appui de celle-ci.
[55] La demande reconventionnelle sera donc rejetée.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de 5 171,61$ plus les intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter du 29 novembre 2005 quant à la somme de 1 346,49$, à compter du 26 janvier 2006 quant à la somme de 759,48$, à compter du 15 octobre 2006 quant à la somme de 1 100$ et à compter du 4 mai 2007 quant à la somme de 1 965,44$;
CONDAMNE de plus la défenderesse à payer au demandeur les frais judiciaires, soit la somme de 146$;
REJETTE, sans frais, la demande reconventionnelle.
FRANÇOIS BOUSQUET, J.C.Q.
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[1] Texte de la demande reconventionnelle.
[2] Page 4 du rapport d'expert P-17
[3] 92$ + 45$ = 137$ + 20,58$ (T.P.S. et T.V.Q.) = 157,58$
[4] Page 5 du rapport d’expertise [P-17]
Source: www.jugements.qc.ca